Notre introduction vous a plu ? Nous revoici pour la suite de notre reportage sur la 24e édition du Brutal Assault, qui s’est une fois de plus tenue dans la forteresse de Josefov, en République Tchèque.
Une première journée relativement soutenue pour l’équipe, qui ne savait plus où donner de la tête, entre les changements drastiques de température mais aussi les surprenantes (re)découvertes propres à ce lieu atypique…
Par nos envoyés spéciaux Stef, Clément & Lucinda.
MERCREDI 07 AOÛT, JOUR 1
Arrivé dans le courant de l’après-midi, nous constatons déjà un fort taux de remplissage devant les deux scènes principales. A peine le temps de prendre nos marques que notre programme chargé commence: les premières notes du concert d’ENSIFERUM ouvrent la marche sur la Jägermeister.
Le son est très bon (ce sera le cas sur les quatre jours… Du moins devant les Mainstages), les Finlandais motivent la foule, comme à leur habitude, mais sans s’éloigner réellement de sa recette habituelle. On a tantôt droit à « la chanson de la bière ! » ou « La chanson du moshpit ! », qui portent bien leurs surnoms.
ENSIFERUM n’hésite pas à précéder le très scandant In My Sword I Trust d’un break bluesie complètement décalé. Très vite, on aperçoit des flammes crachées depuis les murets de la forteresse. En plein jour, elles se font discrètes, mais on verra qu’elles peuvent être bien plus impressionnantes (et réchauffantes !) de nuit. Le groupe finit sous la première averse de notre séjour, et la marée de festivaliers commence alors à se recouvrir de hoodies et autres ponchos de pluie…

Ensiferum
Pour assister au concert de SOILWORK sur la Sea Shepherd, il nous suffit de faire quelques pas vers la droite – contrairement aux festivals à la surface nettement plus importante, on n’aura pas à lutter réellement pour passer d’une Main à une autre, quelle que soit l’heure. Björn Strid arrive sur l’excellent Arrival avec sa troupe et, lorsqu’il se met à chanter… est inaudible. Heureusement, ce qui s’avère être un simple problème de micro est vite réglé, et on peut alors se réjouir du chant varié, hurlant et passionné de l’artiste.
Si Björn démontre une mobilité et des expressions limitées, le concert n’en est pas moins prenant, d’autant que les compos’ du dernier album « Verkligheten » nous avaient déjà bien convaincus.
Mais l’interprète n’était pas au bout de ses peines en termes de soucis techniques… En effet, alors qu’on approche de la fin du concert, le fil de son micro se décroche. Là où d’autres auraient été perturbés, Björn en profite pour tendre l’oreille de manière faussement agacée à l’attention du public, comme pour se plaindre de ne pas les entendre !
SOILWORK achève sa performance sur un air entêtant et une note finale suraiguë puissante qui finissent de nous convaincre.

Soilwork
Après une intro incongrue, JINJER démarre son set juste à côté. La foule est de plus en plus dense, et doit très certainement être composée de curieux souhaitant enfin voir ce que le phénomène ukrainien dont ils ont tant entendu parler donne sur scène… Il faut dire que la popularité du groupe a grandi de façon assez exponentielle ces deux dernières années !
On constate un volume sonore plus important que pour SOILWORK : les passages les plus pêchus ont tendance à tout détruire sur leur passage, menés par l’excellente Tatiana Shmaylyuk, qui alterne de façon si aisée grunts caverneux et chant groovy intense. D’ailleurs, les passages plus calmes et mélodiques reçoivent un accueil attentif et interloqué de la part de ceux qui ne connaissent pas encore vraiment l’univers du groupe, notamment sur le superbe Pisces. Mais les réactions dans leur ensemble (et la nôtre) sont très positives, et il s’agira d’un de nos meilleurs concerts du festival.

Jinjer
Nous partons ensuite à la découverte de l’Octagon, non loin de Mainstages, à l’occasion du passage de WOE UNTO ME : il faut savoir que cette scène, quoiqu’accessible toute la journée, ne commence à s’activer qu’à partir de 19h40 chaque soir. Et les groupes qui s’y produisent attirent les foules à un tel point que l’espace fosse n’a jamais suffi pour accueillir tout le monde… Impossible, donc, d’espérer y voir quelque chose si on avait le malheur de se ramener sur le tard. Il faudra sans aucun doute repenser la chose l’année prochaine, d’autant que les bousculades ont presque failli causer des soucis de sécurité à certains festivaliers…
Mais revenons sans plus tarder à nos biélorusses ! Un écran est suspendu au fond et bouge au gré du vent qui se lève. Finalement, l’ambiance de début d’orage colle bien avec le funeral doom proposé par le groupe, même si leur son est assez mouvementé pour ce style, avec des passages catchy entrecoupant la lourdeur des compositions. Le chanteur vit pleinement sa musique et nous emporte avec lui sans effort. Enfin, l’un des deux guitaristes intervient régulièrement pour apporter une bonne dose d’un chant death caverneux. Très prenant ! Un groupe à découvrir impérativement.

En revenant devant les Main, on a l’occasion de jeter un œil rapide à BATUSHKA sur la Sea Shepherd. Le groupe a fait couler beaucoup d’encre ces derniers temps, à cause de sa division entre deux groupes distincts : le BATUSHKA du chanteur Bartłomiej Krysiuk, et celui de Krzysztof Drabikowski (dit Derph). C’est le premier qui foule la scène du Brutal Assault 2019, et malgré les changements de lineup et départs, on a droit à une mise en scène et des costumes, certes très beaux, mais aussi très similaires à ceux des précédentes tournées. Le quasi dark/ambient liturgique teinté de black fascine toujours les foules, même si on aurait mieux vu le groupe jouer sur la K.A.L. stage, si celle-ci n’était pas si étroite. D’ailleurs, en parlant de ça…
Il est temps en effet de découvrir cet endroit complètement hors du temps. Lorsqu’elle n’est pas affectée, la salle permet aux festivaliers de se vautrer dans les canapés et poufs et de profiter de lumières roses tamisées et de sons ambiants psychédéliques jouant dans les hauts parleurs. Alors forcément, sa programmation se devait de coller à cette atmosphère décalée, avec des groupes d’ambient, de drone, de noise… Et ce ne sont nul autre que les Français d’ANTELOGOS que nous y voyons en premier, en train de célébrer la Voie de la Main Gauche !
Malgré un espace scénique très enfumé, on aperçoit tout de même un musicien derrière son autel qui distribue une coupe pour le rituel, tandis que deux femmes parcourent les premiers rangs pour envoyer de l’encens. Ajouté à la musique, ce côté théâtral est hypnotisant et se termine sur Sanctus Dominus Satanae extrait de “Transcendental Luciferian Devotion”, leur nouvel album sorti en avril dernier. Quelle expérience !

Parkway Drive
Du côté des Main, le show de PARKWAY DRIVE fait probablement partie des moments les plus « spectaculaires » du festival, tandis que l’intro met en scène le groupe sur écran géant et fait la transition avec leur arrivée, qui se fait… sur le côté de la foule ! Clairement, les Australiens ont le sens de la mise en scène. Avec les silhouettes encapuchonnées brandissant des torches, le quartet à cordes sur Writings on the Wall et Shadow Boxing (dommage qu’il soit si peu audible), ou encore les feux d’artifice et la pyrotechnie, on n’est pas dans la demi-mesure, et les compos’ super catchy du groupe n’en sont que plus mises en valeur. Finalement, les lumières ne sont pas à la hauteur de tout ça, mais s’améliorent au fil du set.
A l’inverse, PARKWAY DRIVE prouve que le minimalisme lui réussit tout autant, avec la performance posée de Winston McCall sur Cemetery Bloom en solo. Le public a beau être complètement chaud depuis le début, il respecte et acclame ce passage nettement plus calme.
Pendant le concert des Australiens, une autre partie de notre équipe regagne l’Octagon pour le concert tant attendu de DÉLUGE ! La nuit tombe, une douce brise se lève et une pluie fine s’abat sur la scène… L’attente se fait longue, la foule acclame avec impatience l’arrivée de la tempête. C’est au bout d’une demi-heure de retard que le spectacle commence.

Déluge
Dans l’épaisse brume, on aperçoit six marins prenant place pour nous faire part de leur dévotion envers cette force qu’est le déluge. Le son de la pluie se fait entendre lorsque celle-ci est interrompue par la puissance des riffs qui vient s’échouer sur le public telles ces légendaires vagues que l’on peut entendre dans les anciens récits des eaux profondes !
Une atmosphère morne et pleine de grisaille se dégage des différents morceaux interprétés par le groupe, nous confrontant à la colossale force de la mer ainsi que notre insignifiance face à elle. Les chants viennent littéralement accentuer la grandeur de celle-ci : eh oui, quand quatre membres se mettent à screamer en même temps, ça donne des frissons !
Malheureusement, les fréquences basses ont tendance à prédominer au début du set, ne laissant que peu de places aux guitares et au synthés. Hormis ce petit détail et le retard par rapport à l’horaire annoncé, le groupe nous offre un show exceptionnel. De plus, les conditions climatiques ont véritablement contribué à l’immersion dans leur univers et nous avons droit à un final diluvien. Une véritable gifle divine !

La pluie fait rage sur le millier de silhouettes, qui s’abritent tant bien que mal sous leur poncho en plastique ou leurs hoodies, pour les plus équipés…
Pour finir le tour des différentes scènes, il est temps de passer à l’Obscure Stage pour le passage tardif de THE OCEAN. La tente est complètement excentrée, mais heureusement pour nous, le groupe est un peu en retard, ce qui nous permettra de ne pas louper l’entrée en scène.
Pour notre part, cela faisait bien longtemps qu’on n’avait pas vu les Allemands, et ça fait plaisir de les retrouver ! Le chanteur, proche du public, fait un slam dès le second morceau, puis montera régulièrement sur les retours pour haranguer la foule. Visuellement, si le groupe reste dans l’ombre, les excellentes lumières parviennent à magnifier le tout.
Parfait pour clôturer cette première journée…

Les Nazguls, du haut de la forteresse, veillent sur les festivaliers.
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Photos : Radek Holeš, avec l’aimable autorisation du Brutal Assault !
Photo MF : Clément.